Terre de bocages, de rivières et de forêts, le Pays de Vire abrite une biodiversité précieuse. Pourtant, certaines espèces emblématiques de notre territoire sont aujourd’hui menacées, victimes des changements environnementaux, de l’urbanisation ou encore d’évolution des pratiques humaines. Abeille noire, Cob normand, oiseaux nicheurs, écrevisses à pattes blanches, chauves-souris et hérissons… Autant d’animaux qui jouent un rôle essentiel dans l’équilibre de nos écosystèmes et qui constituent notre patrimoine naturel. Dans cet article, nous vous invitons à partir à la rencontre de ces espèces, à comprendre les défis auxquels elles font face et à découvrir comment chacun, à son échelle, peut contribuer à leur protection.
L’abeille noire Normande
Il y a encore 50 ans, l’abeille noire était l’unique race domestique vivant en Normandie, où elle s’est adaptée au fil des millénaires. Résistante à l’hiver, excellente pollinisatrice, elle joue un rôle clé dans la reproduction des plantes à fleurs et la production d’un miel de qualité. Son apparence sombre, parfois brunâtre, sans anneaux abdominaux complets, la distingue des autres espèces. L’abeille noire présente un intérêt patrimonial, avec un patrimoine génétique unique à transmettre, écologique, car elle est adaptée au climat local et assure une pollinisation régulière, et économique, étant plus résistante et nécessitant moins d’entretien pour les apiculteurs.
Menace : concurrence avec les abeilles hybrides (pollution génétique) et avec les frelons asiatiques (espèce invasive)
Où l’observer ? Au Zoo de Jurques, dans le cadre de l’expérience Rencontre VIP Abeilles
Comment la protéger ? L’ANC (Abeille Normande du Calvados) œuvre depuis le début des années 2000 pour sa préservation grâce à des ruches conservatoires située dans un périmètre de 3km autour des ruchers afin de contrôler la fécondation des reines.
Source : Région Normandie et ANC
crédit photo : Zoo de Jurques
Le cheval Cob normand
Issu d’un croisement avec des pur-sang anglais au 19ème siècle, le Cob normand fut longtemps un allié indispensable de l’armée et de l’agriculture. Né au haras de Saint-Lô, il est aujourd’hui présent dans toute la France. Ce cheval puissant, volontaire et endurant, peut peser jusqu’à 850 kg et mesurer entre 160 et 165 cm au garrot.
Menace : selon une étude de l’Institut Français du Cheval et de l’Équitation (IFCE), les races locales d’équidés sont de plus en plus menacées d’abandon, avec une baisse inquiétante des effectifs depuis 2014.
Où l’observer ? Les Traits Verts Clinchampois proposent des balades gourmandes à bord d’une calèche.
Comment le protéger ? Afin de conserver, valoriser et faire connaître les races patrimoniales normandes, la Région accompagne économiquement les éleveurs ayant fait le choix de conserver et mettre à la reproduction ces animaux. Des mesures sont ainsi mises en place pour la préservation des races menacées (PRM). Par ailleurs, des syndicats et des associations ont été mis en place pour pallier au recul de l’élevage des chevaux de trait.
Source : IFCE (institut français du cheval et de l’équitation)
crédit photo : L. Mach
Ecrevisse à pattes blanches
Cette espèce européenne mesure environ 8-9 cm à l’âge adulte. Omnivore, elle se nourrit de vers, mollusques, larves et végétaux. La reproduction a lieu en automne et les œufs incubent plusieurs mois avant d’éclore au printemps.
Menaces : En forte régression au niveau national pour plusieurs raisons :
- Dégradation de la qualité de l’eau et colmatage des cours d’eau.
- Introduction d’espèces invasives comme l’écrevisse américaine (plus compétitive et plus féconde)
- Maladies telles que la peste de l’écrevisse (transmise par l’écrevisse américaine)
Où l’observer ? Aux cascades de Roullours, au sein de la zone Natura 2000 « Bassin de la Souleuvre » et dans le « Bassin de la Druance »
Comment la protéger ? Le CPIE Collines Normandes et Natura 2000 mettent en place des concertations avec les acteurs locaux pour mettre en œuvre des pratiques respectueuses de l’environnement et particulièrement de la qualité des cours d’eau (limitation des intrants), limitation de ruissellement). Par ailleurs, il est interdit de pêcher ou déplacer l’écrevisse à pattes blanches. L’intercommunalité de la Vire au Noireau a fait installer des passerelles en bois pour réduire le passage des randonneurs et véhicules dans les cours d’eau.
Source : CPIE Collines Normandes et réseau Natura 2000
crédit photo : L. Mach
Les oiseaux nicheurs de Normandie
D’après le Groupe Ornithologique Normand (GONm), 40 % des espèces nicheuses sont menacées. Parmi les 176 espèces évaluées dans la région, 84 sont classées en préoccupation mineure (La Bergeronnette grise, le Pic épeiche ou le Hibou moyen-duc), 13 sont quasi menacées (Le Vanneau huppé, le Grèbe castagneux, ou le Bruant jaune) et 8 sont considérées comme disparues (le Guillemot de Troïl, l’Hirondelle de rochers, le Macareux moine, la Pie-grièche à tête rousse, la Pie-grièche grise, le Pingouin torda, le Pouillot de Bonelli et le Sizerin flammé). Enfin, 69 espèces d’oiseaux sont considérées comme menacées d’extinction (retrouvez la liste complète).
Menace :
- Destruction et fragmentation des milieux naturels (humides et forestiers)
- Modification des paysages agricoles
- Dérangement en période de nidification
- Compétition et prédation inter espèces
- Chasse et braconnage
- Changement climatique
Où les observer ? Au sein des réserves ornithologiques des lacs de la Dathée et du Gast (86 espèces d’oiseaux).
Comment les protéger ?
- Observer les oiseaux à distance avec des jumelles.
- Préserver les haies, bosquets et zones humides.
- Participer aux visites organisées par le GONm pour connaître d’autres bonnes pratiques
Sources : CPIE Collines Normandes et réseau Natura 2000
crédit photo : A. Lemière
Les chauves-souris de Normandie
Entre 16 et 18 espèces de chauves-souris vivent dans le Pays de Vire, parmi lesquelles la pipistrelle et le grand murin. Très mobiles, 2 à 3 de ces espèces migrent vers les pays chauds en hiver tandis que d’autres hibernent localement (caves ou greniers). Elles sortent lors du retour des beaux jours, lorsque la nourriture est plus abondante : insectes et papillons.
Menaces : Allié indispensable dans la régulation des populations d’insectes et bioindicateur de premier ordre, les espèces de chauves-souris rencontrent une forte diminution
- Altérations de leurs habitats (modification des pratiques agricoles et développement des infrastructures routières)
- Forte mortalité infantile et peu prolifiques
Comment les protéger ? Face aux menaces qui pèsent sur les différentes espèces de chauves-souris, le Ministère en charge de l’écologie a souhaité instaurer un 3e Plan National d’Actions en faveur des Chiroptères sur la période 2016-2025. Le PRAC (Plan Régional d’Actions Chiroptères) a pour vocation de préserver les populations de chauves-souris en Normandie et favoriser leur prise en compte dans les projets d’aménagement du territoire. Ces dernières années, 569 gîtes à chiroptères sont suivis régulièrement en Normandie (site d’hibernation et/ou de mise-bas).
Où les observer ? Au sein de l’église de Burcy, par ailleurs, la Maison de la Nature et de la Pierre Sèche organise fréquemment des conférences ou des ateliers sur les chauves-souris (la prochaine).
Source : Agence Normande de la Biodiversité
crédit photo : A. Lemière
Le hérisson d’Europe
Ce petit mammifère nocturne est présent partout en Normandie. Il se cache dans les haies, buissons et tas de bois. Il se nourrit de limaces et autres gastéropodes, jouant un rôle essentiel dans l’écosystème des jardins. Le hérisson est passé de « préoccupation mineure » à « quasiment menacé » lors de la COP16 sur la biodiversité en 2024 et, selon le Groupe Mammologique Normand (GMN), nous n’avons pas assez de données en France pour nous faire une idée précise de leur état.
Menaces :
- Forte mortalité des jeunes (70 % avant un an).
- Activités humaines et précisément trafic routier
Comment les protéger ?
- Le GMN réalise un état des lieux par localisation des points noirs afin d’identifier les espèces impactées. Vous pouvez saisir en ligne vos observations afin que des solutions techniques d’aménagements soient apportées ensuite (saisie en ligne).
- Signaler les hérissons blessés au centre de sauvegarde La Dame Blanche
- Aménager des passages à hérissons entre jardins.
- Ne pas utiliser de pesticides ni de produits toxiques.
Où les observer ? La Maison de la Nature et de la Pierre Sèche organise des événements à propos des hérissons (la prochaine : « Des hérissons dans mon jardin ? » le mercredi 30 juillet).